5
Nov

David Bowie et la blanquette de veau

David BowieSi on sortait à la maison ? Bonne idée ! Vous le savez tous, il y a des jours où, faire la queue pour aller voir unfilm, puis refaire la queue pour aller dîner dans un restaurant (où vous n’avez pas réservé) ; et encore refaire la queue pour trouver un taxi, relève plus du courage que du plaisir. Alors on consulte, son agenda et on découvre qu’il y a plus de trois mois qu’on n’a pas rendue une invitation à dîner à un couple d’amis. Un coup de fil et le rendez-vous est pris. Germaine ma douce et chère compagne qui aime prévoir à l’avance jette son dévolu sur un gigot. Elle prétend devant une de mes rares suggestions en la circonstance que «la blanquette, ça fait fin de mois». Il est vrai qu’on n’est que le 8 du mois. Je lui accorde ce point, mais reste intraitable sur l’autre : pas question de se faire un Monopoly après le dîner. Ce sera soit une des trois cassettes que je viens de louer : The wall (Thorn Emi), un véritable délire m’a-t-on dit, Piaf (Cinéthèque) dont il paraît que c’est à rester le cul par terre tellement c’est beau et émouvant, ou encore Annie Hall (Warner/UA) que nous avons déjà vu trois fois sans en être véritablement rassasiés. Sans compter qu’il nous reste encore quelques disques à écouter. Des tous beaux et des tout neufs. Entre Germaine et moi, le match est nul. Je renonce à la blanquette de veau et elle au boulevard des Capucines, avenue des Champs-Élysées, bref toutes ces propriétés vertes et bleues qu’elle affectionne à chaque partie de Monopoly. La veille de notre dîner, je fais une répétition générale. Je commence par écouter tous les disques, histoire de repérer à la fois les plus intéressants et les meilleures chansons. Pour David Bowie (Let’s dance. Pathé Marconi) pas de problème. Il s’impose de lui-même. Inspiration, bonheur, rythmes, chaque composition, petit joyau, s’attache dans nos têtes et nos cœurs. Et d’un, j’enchaîne illico-presto avec un des rares artistes dont mon affection à l’égard de ses œuvres n’a jamais failli : Jim Capaldi, ex-batteur du groupe Traffic. Il reste égal à lui-même avec son dernier album Fierceheart (Wea). Ses compositions sont fraîches et légèrement musclées. Puis la voix de Jim Capaldi reste comme toujours terriblement prenante. Voilà encore un disque qu’on peut passer et repasser dans son intégralité sans jamais ressentir le moindre ennui. Je suis même prêt à parier que cette œuvre simple et forte sera aussi bonne à écouter dans deux ou trois ans, qu’aujourd’hui. Après ces deux délicieuses sucreries, il me vient comme une envie de goûter à autre chose. Je m’arrache de Jim Capaldipour mettre sur la platine la galette de ZZ Top. De la cuisine me parvient un «Oh » de désapprobation. C’est Germaine qui se laissait aller aurythme de ce bon vieux Jim. Pour le trio texan, faut pas chercher midi à quatorze heures. La dentelle, il la laisse aux autres. Son rock fleure bon la poussière. Eliminator (Warner Bros) c’est onze chansons comme une série d’uppercuts. C’est du «cash and carry». Et on en a pour ses sous. Après ces exercices purement yankees, il n’y a rien de mieux pour se rafraîchir les papilles et le reste, que d’aller faire un tour du côté de la Jamaïque. J’ai entendu dire je ne sais plus où que tout compte fait, la mort de Bob Marley avait en somme du bon. A, savoir qu’elle avait permis la résurgence de talents nouveaux, naguère complètement éclipsés par le génie du prince des Rastas. On ne me fera jamais croire ça pour Peler Tosh, en tous les cas. Je ne l’ai jamais personnellement préféré à Bob. Que ce dernier fut vif où mort. Cela ne veut pas dire que le sieur Pater Tosh soit un gringalet en la matière. Que non. Son Marna Africa (Pathé Marconi) a tous les accents qu’il faut pour faire monter la fièvre. Déhanchements assurés. Groove garanti.